Playlist mise à jour !
Allez, un petit article pour occuper ceux qui, en cette période de confinement, n’ont pas de télétravail ou de gosse, et qui ont fini de racler les derniers tiroirs de Netflix.
Après 6h de traversée très calme, avec un petit moment passé en compagnie des Lillibussiens sur le pont puis une grosse sieste dans Francisco, le ferry débarque à Castro, capitale de la province de l’île de Chiloé. Comme promis, notre pote Barbie nous attend sur le port, accompagné de son épouse Paulina.
Barbie, c’est un pote qu’on a connu dans le milieu des fanfares bordelaises il y a quelques années. Il jouait à la fanfare de l’école d’architecture, la Grasse Bande, et nous dans celle de la fac de médecine, Los Teoporos (big up si certains fanfarons lisent ces lignes… mais peu de chance, la majorité étant analphabète, voire même double-analphabète pour certains). Donc on a fait pas mal de manches, de festivals, et de fêtes avec Barbie, mais en arrivant à Chiloé on ne connaissait toujours pas son vrai prénom, situation assez classique dans le milieu. Barbie c’était très bien, avec ses longs cheveux blonds, pas besoin de chercher plus loin. Mais comme on ne savait pas si dans sa nouvelle vie chilienne, il avait caché son lourd passé de fanfaron, on lui a quand même demandé et donc il a bien un prénom : Nicolas. Scoop.
Mais vous me direz : que fait Barbie à Chiloé ? Et d’ailleurs, c’est quoi Chiloé ? Chiloé, c’est une île grande comme la Corse, située très grossièrement dans la partie Nord du tiers Sud du Chili. Elle prolonge la Cordillère de la côte, chaîne montagneuse entre les Andes et la côte du Pacifique. C’est en réalité la plus grande île de l’archipel de Chiloé, qui se situe en face de la région d’Aysen que nous avons parcourue en remontant la Carretera Austral. On y accède principalement par le Nord, avec de très fréquents bacs qui la relient au continent et un pont en construction à ce niveau ; de notre côté, nous avons pris l’un des quelques bateaux hebdomadaires qui partent de Chaiten à l’Est. C’est une île montagneuse, battue par les pluies et les vents une bonne partie de l’année, très rurale et abondamment recouverte de forêts. Elle est assez récemment devenue une importante région touristique du Chili, les autres activités étant essentiellement la pêche (dont la critiquée salmoniculture) et l’agriculture. Les touristes viennent notamment y voir les quelques dizaines de très belles églises de bois si particulières à l’île.
Paulina et Barbie y vivent depuis quelques années, après avoir fui l’immense Santiago, pour des raisons comparables à celles qui poussent de nombreux franciliens à émigrer. Et je vous invite à lire la biographie de Barbie pour plus d’info sur sa vie et son œuvre (à paraître).
Nous voici donc à Castro, jolie et pentue ville moyenne, très colorée, dont la partie basse est bordée de palafitos, maisons de pêcheurs sur pilotis, le long de l’estuaire. Nos hôtes nous emmènent d’emblée y faire un tour. Barbie, qui bosse comme guide touristique pour arrondir les fins de mois, nous fait visiter l’église et la grand place, avec tous les détails qui rendent les choses 1000 fois plus intéressantes mais dont on ne profite que trop rarement parce qu’il vaut quand même mieux se payer une glace qu’un guide !
Ils nous emmènent ensuite chez eux, dans leur petite maison sur les hauteurs de Castro. On rencontre leur chienne Sinku, aussi gentille que folasse. Les filles se feront rapidement à ses grosses léchouilles en plein visage. Après avoir un peu joué dans le jardin, on fait manger les petites et on prend le temps de les coucher dans la chambre d’amis, en les rassurant assez longuement, comme il se doit à chaque découverte d’un nouvel endroit où dormir. On finit par y arriver, et on se pose enfin avec Paulina et Barbie, autour d’une bonne binche (sauf pour Pauli qui ne boit pas, son seul défaut). Comme je le disais plus haut, on ne connaissait pas très bien Barbie, et pas du tout Pauli. Et bonne nouvelle : l’un comme l’autre sont super chaleureux, accueillants, simples, marrants, intéressants. Ils nous ont vraiment regonflé de chaleur humaine, celle qu’on ressent en passant du temps avec de bons amis, et dont on manque de temps en temps en partant longtemps loin de chez soi ! Ils nous ont accordé une bonne partie de leur temps pendant une semaine, baladés à gauche à droite sur Chiloé, présentés à leurs potes tout aussi cool, et ils se sont adaptés sans aucun problème à notre logistique assez lourde de camping-caristes avec deux enfants en bas âges.
On discute ce soir-là et à de nombreuses reprises pendant la semaine de la situation du pays, échauffé par les manifs d’automne 2019, monstrueuses à Santiago, auxquelles ils ont participé. Il me semble avoir évoqué ce que j’ai compris des (innombrables) raisons justifiant ce soulèvement massif lors de l’article précédent, et nos conversations à Chiloé n’ont fait que nous conforter dans le même sens. L’injustice sociale, c’est mal (à paraître).
Le lendemain, on va faire un tour de l’autre côté pour voir l’océan Pacifique. On charge tout le monde dans Francisco, y compris Sinku qui s’occupe de faire rigoler les filles, et en route. On passe une petite heure sur la plage à regarder Sinku faire des aller-retours, les filles jouer, et à chercher des coquillages. On se trouve ensuite un petit coin dans la nature pour pique-niquer et glandouiller au soleil pendant la sieste des filles. Parce que nous avons la chance d’avoir un grand soleil pendant une bonne partie de notre semaine à Chiloé, ce qui est loin d’être donné à tout le monde ! On se fait une balade dans la végétation, Barbie nous donne un petit cours de botanique in vivo, une autre de ses compétences cachées.
Paulina accueille le jour d’après un très sympathique couple d’amis qui vient se faire une petite parilla avec nous, ils nous préparent des pisco sour, et l’un d’eux qui bosse comme infirmier dans une des îles de l’archipel nous raconte le degré d’isolement des gens qui y vivent, loin de tout depuis toujours. Son boulot le balade donc en bateau d’îe en île, et le mène à des situations assez incroyables ou son rôle devient celui au choix d’un médecin, assistant social, sage-femme…
Le lendemain nous nous rendons à Queilen, au sud, sur une presqu’île menant à un phare où nous passons l’après-midi, en compagnie de nos copains les Lillibussiens qui nous rejoignent. On passe la soirée et la nuit dans une prairie perdue entre une plage et une église isolée, les filles retrouvent leurs copains, c’est le bonheur. On se refait un bon petit asado de cordero (agneau). La soirée se prolonge jusque très tard, et le lendemain est assez rude !
Nous passons la journée du lendemain à Dalcahue où nous prenons le bac en fin de journée pour passer 3 jours sur la petite île de Quinchao en compagnie des Lillibussiens. Barbie nous accompagne jusqu’à Dalcahue, où il nous emmène dans une sorte de grande cantine sur le front de mer, toute en bois, où on peut goûter un bon nombre des spécialités de la gastronomie chilote, à base de produits de la mer et de patates essentiellement. On teste, enfin, le curanto, le grand classique, plat mijoté mélangeant moules géantes (les choros), saucisses et autres pièces de viande éventuellement, et des pommes de terre sous forme de différentes galettes. La recette authentique se fait dans un trou creusé dans la terre où tous les ingrédients cuisent, recouverts de grandes feuilles, sur des pierres chauffées à rouge par un feu de bois. Et c’est vraiment délicieux. On teste aussi une soupe de poisson et de fruits de mer bien relevée et excellente également. Le tout arrosé d’un petit verre de blanc, dans une chaleureuse ambiance de marché, du genre Capus pour les bordelais. Pour moi, de loin le meilleur moment gastronomique depuis le début de notre voyage. On se balade ensuite sur le front de mer en attendant Paulina qui nous rejoint pour le café. On les laisse donc rentrer à Castro avant d’embarquer pour Quinchao.
La traversée est presque un prolongement de la route : ça dure 5mn et il y a un bac toutes les 10mn jusqu’à tard le soir. L’île de Quinchao a beau être petite, elle est quand même relativement peuplée avec pas mal de petits villages et la ville d’Achao, qui doit bien compter 10 ou 20000 habitants.
On se pose à deux familles le premier soir dans un microscopique patelin au bord de l’eau et d’une église en bois, comme d’habitude. Je vais faire une petite pêche aux pétoncles avec les enfants. La balade est sympa, heureusement parce qu’on n’attrape absolument rien. On ne s’éternise pas après le repas, la soirée de la veille nous a tous bien calmés.
On passe une partie de la journée du lendemain à Curaco de Velez, réputée pour ses huitres géantes et, attention suspense, pour son église en bois ! On s’offre un sympathique petit resto façon guinguette, qui démarre par une déception car impossible d’y goûter les fameuses huitres géantes, mais on se rattrape sur les délicieux empanadas de mariscos. On rejoint les Lillibussiens pour une soirée tacos et moules géantes au barbeuk, seuls au bord d’une plage magnifique.
On quitte la belle et paisible Quinchao le lendemain, pour retourner à Castro fêter l’anniversaire de Barbie chez ses copains Pancha et German. Barbie nous prépare un authentique Curanto traditionnel, avec le trou dans le jardin et tout ce qui va avec. C’est vraiment marrant et convivial (impatients de tester ça en France), et surtout c’est hyper bon, on mange chacun notre poids en moules, et on engloutit encore l’équivalent en vin. Autant dire que la fin de soirée est assez calme même si les discussions se poursuivent assez tard avec Pauli et les potes, sur fond de ronflements de Barbie.
La journée du lendemain, on se retrouve à peu près tous sur un spot que seuls les chilotes connaissent, dans une sorte de grande clairière, au bord d’une rivière qui forme un bassin avec un banc de sable qui stoppe le courant. Un petit paradis naturel où on pique-nique et on se baigne (enfin pas Nanie, l’eau étant à moins de 27°, soit glaciale…). On réussit même, grâce aux efforts de Nanie, à endormir les filles dans leur mini tente 2sec pour la sieste.
Arrive alors le dernier jour de cette formidable semaine avec Pauli et Barbie. On squatte une dernière fois leur douche et on lève le camp, un peu nostalgiques. Après quelques dizaines de km de route dont un ripio particulièrement moche, on arrive au Nord Est de Chiloé, à Duhatao, dans une sorte de petite baie bordée de plages de sable clair, dont nous avait parlé German. L’endroit est presque désert et on y passe deux belles journées de pure farniente et baignade surtout pour les petites. On passe ensuite une matinée à Pinihuil où on décide de faire une petite excursion touristique en bateau. On nous fait serpenter entre de petits îlots rocheux couverts de pingouins, de loups de mer, et d’un grand nombre d’espèces d’oiseaux marins qui nous sont présentés par un guide intéressant et plutôt marrant.
On embarque dès le lendemain matin dans le bac pour retrouver le continent et poursuivre notre route vers le Nord…
Marianne
avril 20, 2020 at 10:50Que de sourires !