De la Ruta 40 à la Carretera Austral

Nous voilà donc partis pour traverser la frontière au niveau du lago Buenos Aires (qui s’appelle lago General Carrera au Chili, assez surprenant cette double appellation). Comme l’a expliqué Etienne on préfère profiter du Chili tant qu’il fait beau et surtout éviter au maximum le mauvais ripio qui secoue trop notre Francisco, et les filles avec. Les pauvres chéries vivent assez mal ces vibrations coincées dans leur siège bébé.
De Esquel nous descendons donc vers Los Antiguos, la ville frontière argentine en bord de lac. On quitte les montagnes et on a vite l’impression d’être de retour dans la Pampa : paysages désertiques, un village de 1000 habitants tous les 100/150km, plus vraiment de verdure. On croise plein d’animaux sauvages en bord de route : des moutons à foison, quelques flamants roses perdus dans les petits lacs disséminés ça et là, mais aussi des tatous, des nandus et des guanacos ! C’est tellement inhabituel de croiser de tels animaux en dehors des réserves ou des zoos, on se régale !

Nous nous arrêtons dans les petites villes de Rio Mayo et Gobernador Costa. Dans cette dernière nous faisons jouer les filles sous fond de concert d’un groupe familial on ne peut plus approximatif. Les paroles louent la grandeur de Jesus le sauveur, et le tout nous donne presque envie de prier Pachamama pour que la fille apprenne à chanter juste et que la maman arrête de faire crier son violon dans le micro. Mais ça a le mérite de bien nous faire rigoler !

Le 27 janvier nous arrivons à Perito Moreno (la ville, pas le glacier), où nous retrouvons nos amis français qui nous attendent au mini-camping Raúl. C’est en gros un petit jardin où on peut stocker 4 ou 5 camions, avec une entrée si étroite qu’on rase les murs avec notre Francisco, murs que nos copains ont bien frottés avec leurs camions de film de science fiction. Mais l’endroit et bien isolé de la route et surtout du vent, qui fait des ravages dans cette région.
Nous vivons d’ailleurs quelques mésaventures dans ce petit camping à cause des tornades de vent. Xavier, le patriarche de la famille, s’est retrouvé éjecté contre la paroi de son camion en ouvrant sa porte un matin, cassant sa clef dans la serrure. Le petit Gabriel s’est envolé du haut de l’échelle de son camion et s’est retrouvé au sol 2 mètres plus bas. Et la pauvre Lolotte, qui était en train de descendre la marche de Francisco, a vu la porte du camping car claquer sur sa petite jambe. Nous avons tous eu de grandes frayeurs, mais heureusement il n’y a eu que des jolis bleus sans conséquence. Ouf !

Dans le petit jardin il y a un vieux silo retapé en cuisine commune, avec cheminée, grosse gazinière et grande tablée. Nous nous empressons donc de préparer un gros barbecue dans la cheminée et nous faisons un bon repas entre amis, à l’abri du vent dans notre vieux silo. Un couple d’argentins s’est joint à nous, on passe une super soirée à se raconter nos voyages.

Le lendemain nous nous accordons le luxe de faire laver notre linge dans une laverie, nous faisons jouer les filles dans un parc avec plein d’autres enfants, Etienne profite une nouvelle fois des conseils de Xavier le bricoleur pour les petits réparations de Francisco, et le soir nous faisons à nouveau un bon repas dans le silo, cette fois accompagnés de 2 jeunes françaises qui baroudent dans les parcs nationaux et grimpent les volcans, Océane et Appoline. Elles viennent d’arriver du Chili et nous confirment que les routes autour du lac Buenos Aires ne sont pas faciles à traverser, mais qu’effectivement les paysages sont magnifiques. Nous hésitons toujours sur l’itinéraire à suivre une fois la frontière passée, mais on se dit qu’on se renseignera une fois au Chili.
Le lendemain nous nous apprêtons à dire au revoir à nos copains et reprendre la route, mais devant leurs moues tristes nous hésitons un quart de seconde, ok on se refait un dernier barbecue avec eux le soir ! Nous avons donc passé 3 jours à Perito Moreno en super compagnie, à refaire le monde dans un silo improbable, c’était un moment extra. Et on compte bien se recroiser plus haut au Chili dans quelques semaines !

Le 30 nous quittons la ruta 40 et nous nous dirigeons vers l’estancia La Ascensión, au bord du lac Buenos Aires. C’est un petit havre de paix au milieu des montagnes, avec le plus beau paysage qu’on ait vu jusque là. On peut faire quelques balades et les filles peuvent jouer avec des cailloux au bord de l’eau. Le lendemain nous faisons un petit barbecue en famille et nous faisons la connaissance d’un couple d’argentins, Fernando et Lucia, avec leur petite fille Emma, âgée d’une semaine de plus que Charlotte. Le courant passe vraiment bien, on discute jusqu’à la fin de la journée et on se donne rendez-vous pour un autre barbecue le dimanche, pour fêter l’anniversaire d’Étienne.

Mais avant ça, le samedi, on va fêter l’anniversaire dans la ville de Los Antiguos. On se trouve un petit resto avec wifi, les filles mangent leurs éternelles frites-ketchup-mayonnaise-moutarde, Etienne son burger, et on déguste la bonne bière locale. Une fois les filles à la sieste dans Francisco garé juste devant le restaurant (les patrons nous ont maudits), Etienne a eu la surprise de faire une tournée des copains, pour remplacer une pseudo tournée des bars. Pendant 2h il a pu faire des appels vidéos avec la famille et les amis de France, mais aussi de Londres et de La Réunion, le tout en buvant des bières et un peu de whisky servi en douce sous la table. On a pu surtout faire connaissance avec le petit Martin, neveu tout mignon né le matin même, un 1er février comme son tonton <3 Un moment fort en émotions !

Le soir nous dormons sur place, à 50 mètres du restaurant, et le dimanche nous rejoignons nos copains argentins pour le barbecue dominical. On passe encore une fois une super journée en leur compagnie, la petite Emma joue avec les filles, Etienne prend des notes et dessine déjà les plans du barbecue parfait qu’on construira dans notre future maison. Puis on dit au revoir à nos nouveaux amis qui travaillent le lendemain, et on se donne rendez-vous en France à notre retour. On espère sincèrement qu’ils pourront venir nous voir et qu’on repassera de bons moments ensemble, peut-être même tester notre barbecue de compét’ !

Le 3 février nous revenons dormir à Los Antiguos. Nous finissons de vider le frigo (aucun fruit, légume, produit laitier, viande ne peut passer la frontière), on est fin prêts. Ce passage douanier est réputé pour être compliqué. Notamment à cause d’une douanière en particulier qui s’amuse à faire vider tous les placards et la cale sur le trottoir pour pouvoir tout mettre dans leur mega scanner. Alors on part tôt, motivés. Le poste frontière côté argentin se passe comme sur des roulettes, on prend même le temps de discuter avec Charlotte, une française qui voyage pendant 2 mois avec son fils Mao de 8 ans. Puis nous arrivons au poste frontière chilien, on s’attend à tout. Nous remplissons les 50 papiers demandés pour aller aux guichets, Oli et Lolotte courent partout en jouant, rigolant, en compagnie d’une petite argentine du même âge, puis on nous demande d’amener Francisco devant les bureaux pour inspection. Une femme arrive et demande à monter, la tension est à son maximum, est-ce la fameuse douanière dont tout le monde parle ? Elle nous demande d’ouvrir les placards un par un, et là ô miracle, ne nous fait rien sortir. Elle a juste récupéré une gousse d’ail et du gingembre que nous avions laissé traîner exprès pour pouvoir dire « il ne nous reste que ça comme fruits et légumes » (c’est douteux apparemment de n’avoir rien à déclarer). Le tout dure à peine 10 minutes, la douanière nous remercie et nous dit qu’on peut partir. Youpi ! Bon d’accord, je dois avouer que Charlotte a joué sa carte maîtresse dès la montée de l’agent dans le camping car : un énorme caca qu’il a fallu changer en catastrophe sur la table, au beau milieu de Francisco où la douanière faisait son inspection, embaumant sa visite d’un magnifique arôme. Merci Lolotte, on savait qu’on pouvait compter sur toi !

Nous sommes donc au Chili, et tout s’est bien passé ! La ville frontière de Chile Chico est très agréable avec ses maisons en bois colorées. Nous faisons jouer un peu les filles dehors puis nous nous dirigeons vers un restaurant oriental qui a bonne presse auprès des voyageurs. Et puis il faut dire que c’est assez rare de croiser autre chose qu’un restaurant d’empanadas ou de grillades. Nous arrivons avec notre matos habituel : réhausseurs, bavoirs géants, jeux en bois etc… Le serveur n’a même pas le temps de nous donner le menu du jour qu’Oli et Lolotte font magistralement tomber à plat un des paravents incrusté de fausses pierres précieuses du restaurant. Un grand boum retentit, suivi de près par les hurlements des filles qui ont eu très peur. Heureusement pas de casse. Mais une belle entrée en fanfare comme on les aime ! La cuisine est bonne, même si personnellement je ne me régale pas car je n’apprécie pas le mouton, et nous passons un bon moment à peu près au calme. Les patrons proposent d’offrir une glace aux filles, on les remercie chaleureusement, les filles bien à leur manière en faisant tomber chacune leur boule de glace fondue sur le carrelage… Après ce dernier épisode nous abandonnons, on nettoie tout ce qu’on peut et on file en remballant tout notre matos !

Le lendemain nous partons faire le mirador de Chile Chico, 234 marches que les filles ont grimpées comme des grandes ! On est encore une fois bluffés par la vitesse à laquelle elles grandissent et à quel point elles sont débrouillardes. Depuis quelques semaines elles font des progrès dingues !

Le 6 février nous sommes 2ème sur liste d’attente pour prendre le ferry jusqu’à Puerto Ingeniero Ibañez. Après encore moult hésitations nous avons décidé de ne pas faire le tour du lac General Carrera par l’ouest. Même si apparemment c’est la plus belle partie de la Carretera Austral elle est aussi réputée pour être difficile à traverser avec un camping car. Beaucoup le font certes, mais avec les petites on préfère prendre le bateau et rattraper la route au niveau où elle commence à être meilleure.
Nous voilà donc sur le quai, le ferry est tout petit, nous avons peu d’espoir. Nous voyons quelques voitures et camions monter, et même, accrochez-vous, une ambulance du samu avec gyrophare allumé ! Avec 2h de traversée, le patient avait intérêt à ne pas être trop mal en point… Et finalement on vient nous dire qu’on a une place sur le bateau, c’est parti !

2h de dessins, comptines, histoires, légos plus tard, nous descendons sur le quai de Puerto Ingeniero Ibañez, au nord du lac. Une fois n’est pas coutume nous nous dirigeons vers un restaurant, ou plutôt une cerveceria qui fait aussi à manger, car l’après-midi a été long. Le tenancier est aimable comme une porte de prison, mais qu’à cela ne tienne, le restaurant est grand et désert, un paradis pour nous. Nous installons notre matériel et dégustons une bonne bière bien fraîche, les filles ont droit à un jus de fruits rouges pressés, on se régale avec la pièce de boeuf et le saumon, on est au top ! À ce moment-là s’installe une famille chilienne bien pire que nous. 3 adultes pour 9 enfants. Oui vous avez bien lu. Un couple et la soeur, les uns avec 3 enfants, l’autre avec 6 ! Les enfants font un boucan d’enfer, ravagent les jouets des filles, les planquent dans les pots de fleur, refusent les livres qu’Olivia leur tend avec un grand sourire… de vrais petits diables. Lorsqu’on entend le patron dire à nos voisins, sûrement en pensant qu’on n’y comprend rien, « je vends ça pour du saumon mais en fait c’est de la truite », c’en est trop, on se sauve !

Le lendemain nous arrivons à Villa Cerro Castillo, ça y est nous sommes sur la Carretera Austral ! Et c’est vrai que c’est magnifique. C’est très vert, il y a des petits ruisseaux partout, au milieu de montagnes avec des pics impressionnants, notamment le Cerro Castillo, tel un château comme son nom l’indique. Etienne profite de la sieste et du beau temps pour refaire des joints sur le toit de Francisco, puis nous faisons une belle balade jusqu’à un mirador et ce qu’ils appellent le « paredón de las manos » : un endroit au pied d’une falaise où l’on peut voir des peintures rupestres de mains du peuple tehuelche datant de 1000 ans avant JC.

On se plaît bien dans cette partie du Chili. Les paysages sont vraiment à couper le souffle, et il y a tellement de balades à faire ! On sent qu’on va passer de très bons moments dans ce cadre de rêve. La suite au prochain épisode !

Un commentaire dans “De la Ruta 40 à la Carretera Austral

  1. Eric

    février 16, 2020 at 3:24

    En lisant votre article j’ai l’impression de vous accompagné un peu plus longtemps. Et on rigole bien sur certain passage 😉
    À bientôt sur la route
    Signé: Le conducteur du camion de film de science fiction

    • Author

      Nanie

      février 16, 2020 at 8:04

      Ça nous a rappelé de bons souvenirs d’écrire cet article 😊 On a hâte de vous recroiser sur la route bientôt !

  2. Ama

    mars 2, 2020 at 12:54

    Hello ! Trop bien le Chili. C’est un pays qui m’a toujours fait rêvé. C’est quand même génial de vous être lancé dans cette aventure. Et au fil des postes, on voit vos deux filoutes grandir… Je vous fait un gros bisou de Bordeaux !

  3. Author

    Nanie

    mars 5, 2020 at 12:12

    Gros bisous Ama et merci pour ton petit mot ! Vous nous manquez 😙

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